Un été très productif, j’ai énormément progressé sur le storyboard du volume 2, sachant que je m’étais donné un petit planning que j’ai, pour l’instant et pour une fois, correctement respecté. J’ai planifié un début de promotion du premier volume avec un dossier de presse à destination de médias ou d’influenceurs ; je vais voir quand je l’utilise, mais il était à mon sens primordial, avant d’entamer l’action promotionnelle, de pouvoir montrer voire d’assurer le lancement du second volume.
Au début de l’été, quand j’ai entamé cette étape, j’étais encore dans le flou. J’avais estimé le second volume, par rapport au synopsis et aux dialogues créés, à un peu plus d’une centaine de pages, tranquillement. Je dois avouer que je me suis cassé la tête pour trouver un moyen d’accélérer les choses, car j’ai mis deux ans pour créer les 48 pages du premier volume, sachant que ce temps a fortement inclus l’élaboration de tous les process qui sont maintenant presque (j’abandonnerai ce terme quand j’aurai achevé le second volume) digérés. J’aurais quand même pas mal tâtonné pour le premier volume, paradoxalement assez positivement (je n’ai jamais été bloqué, le processus créatif aura été très positivement heuristique), mais ça me permet d’avoir une vue claire sur le temps de production et les conditions matérielles à assurer/assumer. Donc, pour le second, en envisageant une centaine de page, ça me demandait à minima une centaine de jours, sachant que je ne considère que les jours ouvrables (voire ouvrés) sur une année, ça signifie entre 48 et 60 pages max par an. Ce qui me faisait prévoir la sortie du volume deux à minima à mi 2025 (très optimiste) voire en 2026 (très réaliste). Pas que je sois avare de mon temps, mais vu ce que j’ai à dessiner, c’était un poil décourageant. Le choix de la BD n’est pas en soi ma fin ultime, mon véritable dessein (coucou la VF d’Hannibal) c’est bien déployer tout l’univers que j’ai créé, et c’est pour ça que j’ai toujours cherché un compromis entre la qualité de réalisation et la contrainte de temps pour ne pas me perdre dans un marathon qui me verrait dépérir, sur la fin, d’épuisement. Donc, prévoir un volume tous les deux ans, c’était très déprimant. J’avais beau me rassurer, méthode Coué (Emile, pas l’autre), avec l’usage d’IA et la possibilité de sous-traiter certains aspects techniques, j’avançais comme toujours en ne me donnant pas le confort du doute introspectif.
Bref, au début de l’été, j’avais les dialogues de 29 scènes qui incluaient la totalité du premier sous-arc désigné par le titre « Herakliskos ». 29 scènes qui amenaient jusqu’à la conclusion de ce premier chapitre correspondant à la fin de l’enfance de mon petit héros, conclue autour de sa petite dizaine, juste avant d’adolescence. J’ai alors commis une petite erreur, lors de la numération des pages par rapport aux lignes dialoguées, en sous-estimant la partie « action » du récit. La raison étant que pour le premier volume, pour tenir dans l’ornière des 48 page, j’ai fait le choix d’être très synthétique, de faire court et sobre. C’est pour cette raison que les scènes d’action sont à la fois brèves et finalement rares. Privilégiant l’exposition de l’histoire, des concepts, des motivations, j’ai un peu maltraité la partie vive du récit, à mon grand regret. Car amateur de mangas et de comics, il me tenait à coeur d’implémenter, dans mon récit, le dynamisme de ces médiums qui par rapport à la BD franco-belge favorisent davantage les moments que je qualifierais de « cinétiques ». Rapidement, quand j’ai créé les premières pages du storyboard du volume 2, j’ai instauré, je me suis imposé, deux règles ; la première étant de réaliser un storyboard « avancé », la seconde de ne plus sacrifier l’action pour le propos.
Quand je parle d’un storyboard « avancé », je parle d’un storyboard un poil davantage travaillé que ce que j’avais l’habitude de faire. Cet été, j’aurais donc mis en place un nouveau process qui consiste à créer un storyboard très succinct, à l’image de ce que je faisais avant, pour ensuite réaliser une page de storyboard un poil plus fouillé, une sorte de brouillon très abouti de ce que sera la page finale. Ce qui me procure plusieurs avantages : voir concrètement le travail à faire pour les personnages mais aussi les décors, bosser sur les questions anatomiques et le matériel iconographique (bulles, phylactères, lignes de mouvement, etc.), et constater à l’arrivée du résultat de la structuration des cases. Ce vendredi 13 septembre, j’en suis à 40 pages finalisées, et m’étant donné jusqu’à octobre pour finir cette étape, il me reste une quinzaine de jours pour les 8 pages restantes, ce qui est confortable, très confortable. Et je suis très satisfait de ce qui aura été déjà créé, effectivement très fructueux, bien plus même que je ne l’avais prévu.
Quand je parle de ne plus sacrifier l’action pour le propos, je veux dire que cette fois, l’action sera, quand il le faudra, le propos. Des 40 pages déjà storyboardées, plus de la moitié sont à présent des phases d’action. Quand j’essaie d’expliquer la raison pour laquelle le premier volume me frustre, c’est compliqué de faire comprendre ma volonté forte de créer une BD immersive et trépidante. Le volume 1 est un peu fastidieux par sa volonté explicative, sachant que ça reste somme toute relatif, tout dépendant du curseur que met le lecteur sur l’idée qu’il se fait d’un récit. J’ai déjà longuement disserté sur la construction narrative et les archétypes que notamment le cinéma américain des années 80 ont imposé à nombre d’auteurs. Imaginer un récit comme un rollercoaster est tentant, mais j’ai voulu à l’inverse, prendre le temps de poser mon histoire, sachant tout ce que j’avais à dire par la suite. Comme présenter un alphabet avant d’entamer la présentation d’un discours. Malgré tout, j’ai ressenti une nette frustration à la vision du résultat. J’en suis à la fois très satisfait, mais à mes yeux ça tourne un peu à la grosse promesse… que le volume 2 réalise enfin. C’est pour cette raison (mais ce n’est pas la seule) que je n’ai pas entamé la promotion du volume 1. Le storyboard avancé, clair et explicite, montre ce que sera vraiment le récit dessiné et impose le ton final de mon propos : un mélange entre intrigues, mystères, énigmes ET des péripéties, combats, voyages.
A l’arrivée, une fois les dialogues implémentés sur les pages de ce storyboard, le volume 2 sera parfaitement lisible. Il devient, en lui-même, une petite oeuvre et ça aussi ça me plaît. Je n’ai jamais voulu réduire la création de la BD à la fin ultime que je poursuis. Je voudrais davantage, toujours dans un processus artistique, accompagner, rendre visible et lisible le processus de création d’une oeuvre. Puis à la fin, quand il y aura assez de capital éditorial réalisé, l’exploiter au-delà de la petite case pour migrer sur d’autres médiums. Cet été, il m’est arrivé de relire certaines notes écrites au tout début du projet, et comme toujours, je suis sidéré par ma capacité à oublier ce que j’avais pensé et maturé auparavant. Je vois des pistes que j’ai depuis abandonné, je redécouvre des décisions que j’avais prises et qui m’épargne d’avoir à recommencer un travail créatif. De toute cette masse, introspective, de réflexions, de notes, d’impressions, j’espère à terme créer le récit d’une aventure créative qui en elle-même sera peut-être source d’inspiration pour d’autres auteurs, abandonnés à leur sort comme je le fus dans un monde moderne, tellement balisé qu’il laisse croire, souvent, qu’il n’y a pas d’autres choix que se conformer ou abandonner. Dans le fond des choses, je voudrais, comme toujours dans ma vie, encourager à la liberté et à la résistance, ces deux seules idoles qui m’auront toujours profondément animé.
Crédits image de tête : une image « cropée » d’un prompt (A strange man imagine an storyboard with full of details and actions about a story in a mythological world Alphonse Mucha art deco) réalisé avec l’IA Nightcafé. J’adore les « défauts » de ces images réalisées par ces IA finalement très décevantes.