Au début de mon récit, j’ose quelque chose vraiment d’iconoclaste, et l’air de rien, ce fut pour moi un vrai dilemme. Je ne suis pas trop amateur des récits, inspirés de la mythologie grecque, qui inventent un peu trop par rapport au matériel initial, qui est déjà incroyablement riche en lui même. C’est pour ça que j’ai fait le choix, stratégie scénaristique comme une autre, de me lover dans les blancs et les non dits pour faire parfois mon opportuniste terrier créatif.

Concernant Oedipe, c’est aussi, un peu, par lassitude de voir toujours le focus, comme une obsession, sur le triste sort du héros qui joue un tour funeste à ses deux parents. Personnellement, j’ai toujours considéré ce récit avec beaucoup de circonspection, car s’il me fascine, c’est davantage dans la raison qui a motivé la création ou le rappel de cette histoire. Alors que dans l’Iliade on parle de la cérémonie funèbre du roi de Thèbes, dans l’Odyssée on évoque la mort du père et la relation (involontairement, c’est important) incestueuse avec la mère… Il y a pour moi une divergence, soudaine, d’une « opinion » sur un personnage renommé. J’ai toujours vu une dimension « politique » dans les oeuvres attribuées à Homère, avec une valorisation, par exemple, de héros à la moralité discutable (la fameuse Metis d’Odysseus/Ulysse qui n’est pas moins que l’apologie de la tromperie mu en principe admirable…). Donc, en créant mon scénario, détaillant l’histoire de Thèbes telle qu’elle est plus ou moins rapportée par les mythologues (et non les historiens), je suis tombé sur cettes congruences (je devrais arrêté d’utiliser ce terme, mais j’aime son son (et je ne bégaie pas) : Créon revient (bien avant Ulysse) et Laodamas comme Thersandre sont contemporains de Diomède, qui lui-même est contemporain de Philoctètes, celui à qui Heraklès confie ses armes avant de mourir. J’ai alors été obsédé par ce simple fait… contrairement à un Persée, perdu dans le temps mythologique, Heraklès ne trainait pas loin des héros de la grande guerre contre Troie. Il était logique, alors, de plus en voyant revenir, encore, le personnage de Créon, de résister à la tentation comme l’invite Oscar Wilde, soit à y céder.

En écrivant ces mots ce matin, je suis encore fasciné par la proximité d’Heraklès au niveau chronologique. Car ça ramène ces légendes, ces mythes, dans un espace de temps et de lieu finalement très condensé. Mais je me suis toujours dit que mon idée allait provoquer au mieux un haussement d’épaules des amateurs de mythologie, au pire leur indignation. Pourtant, c’est pour moi l’un des avantages mésestimés de ces récits, soit la possibilité de les relier entre eux pour trouver de nouvelles synergies, de nouvelles logiques, de nouvelles histoires. Et si la parenté que j’ai créée entre les deux héros dans le premier volume des Cycles d’Ouranos peut légitimement susciter le doute (mais je préférerai l’amusement), il n’en reste pas moins qu’il y a un mystère à élucider concernant la présence des parents d’Heraklès à Thèbes, sous l’une des deux régences, je penche pour la seconde, de Créon.

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