7° Œdipe dans les Cycles d’Ouranos

Oedipe dans les Cycles d'Ouranos

A ma connaissance, mais je suis loin d’être omniscient, il n’y a pas d’œuvres qui mettent en scène simultanément Œdipe et Heraklès. Et pour cause, les deux héros n’apparaissent à aucun moment dans leur contexte diégétique. Personnellement, ce fut pour moi une « petite » prise de tête pour gérer Œdipe en tant que protagoniste convenant à ma vision « moraliste » de l’histoire. Il faut dire que le mythe, certainement un des plus célèbres au vu de la récupération par ce cher Freud et la psychanalyse, a passablement rendu la chose difficile. Quand une histoire, ainsi contée, est aussi connue et reconnue, délicat d’oser modifier le point de vue et donc l’histoire même. Mais partant du fait que dans les omissions, les blancs, les absences, les contradictions, il y avait un terrain fertile à la création, j’ai fini par trouver un angle d’attaque.

J’ai souvent écrit, notamment sur ce blog qui est un journal de bord du projet, qu’il y avait certaines occurrences qui rendaient pourtant la rencontre plausible voire inévitable. La première occurrence est bien entendu le lieu : Thèbes, Thébai dans les Cycles d’Ouranos, est une des plus grandes cités état de la Grèce antique… impossibilité d’une homonymie, c’est bien cette ville et pas une autre. La seconde, la présence de Créon, Kréon dans les CdO, l’archétype de régent qui assume sa fonction à de nombreuses reprises et pour le moins dans la longueur, qui est présent dans les deux récits. La troisième, le temps, car la bataille des 7 contre Thèbes, match aller (les papas) et retour (les fils), se déroule bien durant le règne tumultueux des fils d’Œdipe… et quelques années avant la guerre contre Troie, qui découle pour beaucoup de l’assaut d’Heraklès contre la cité et l’enlèvement d’Hésione. Le principe de la rencontre ainsi validé, comment intégrer Œdipe à mon intrigue et surtout, quelle histoire pour cet Œdipe que je ne voulais pas victime de cette calamité déterministe qui lui fait épouser sa mère et épouser son père ?

Lors de l’écriture du premier projet, qui s’appuyait alors essentiellement sur l’Iliade d’Homère, j’avais fini par trouver le récit très partisan. Donc politique, donc potentiellement partial. Le fameux récit tragique qui voit Œdipe parricide et incestueux est l’oeuvre de Sophocle, qui vécut essentiellement à Athènes (enfin selon mes limitées connaissances), ce qui peut justifier le choix d’un mythe exogène pour mettre en scène des événements moralement répréhensibles ; en bref, ça se passe pas chez nous mais ailleurs, donc on peut en parler. Œdipe aurait donc été un nom célèbre soutenant un récit en lui donnant à la fois la valeur de comparaison tout en lui apportant la notoriété d’une légende qui devait être pour le moins célèbre (la défaite de la Sphinge).

Ensuite, les traces de la légende d’Œdipe avant la pièce de Sophocle dans les deux oeuvre homériques, donnent une version différente : dans l’Iliade, il est évoqué des « jeux funèbres » organisés en l’honneur du monarque mort à la guerre et dans l’Odyssée le cher Ulysse raconte l’histoire d’Epicaste, mère d’Oedipe, tourmentée par les Erinyes après son union incestueuse. Pour le reste, des fragments restants des oeuvres liées à la légende d’Oedipe, point d’inceste à l’horizon. Mieux, dans l’Oedipodie attribué à Kinaithon, selon les éléments référencés dans la page wikipédia dédiée à Oedipe, les deux fils d’Oedipe ne sont plus de Jocaste/Epicaste mais bien d’une certaine Euriganée… je dois avouer que je n’ai pas poussé le vice à vérifier tout ça, même si mon intention, fortement sensible, était bien de trouver le moindre prétexte à me débarrasser de ces questions d’inceste qui me mettaient dans une fâcheuse posture pour créer une histoire un tant soit peu surprenante. J’ai fini par trouver une certaine approche, en me servant de la piste génétique pour à la fois respecter plus ou moins le récit de Sophocle tout en m’en affranchissant clairement.

Dans ce premier volume des Cycles d’Ouranos, on découvre donc Œdipe, oncle du héros, sans qu’à aucun moment les liens familiaux ne soient clairement explicités. Il est évident que ce statut est une facilité, une mascarade, un camouflage, pour justifier la présence d’Œdipe auprès d’Alkideus et ses parents, et le refuge providentiel à Thébai. Des mystères se cachent derrière tout ça, qui seront révélés par la suite, explicitant notamment les conditions de la naissance du héros principal comme des motivations poursuivis par mon Œdipe, personnage très complexe et pour le moins surprenant. A l’encontre d’autres protagonistes à la moralité sans faille, le lecteur découvrira par la suite que mon Œdipe, sans sombrer dans les affres tortueux de l’inceste, a su plus d’une fois faire certaines infractions à la morale pour poursuivre ses propres plans et mener ses propres expériences. Tempéré par la suite par la fidèle Phix, un personnage féminin passionnant, il doit toujours arbitrer avec celle-ci, témoin et juge de ses actions depuis sa « victoire » contre la terrible sphinge.

Il y a à noter son apparence physique qui n’est pas non plus anodine. Révélatrice d’un archétype génétique, elle est aussi une des clés de l’histoire.

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